L'ajustement de l'emploi pendant la crise. Une comparaison internationale et sectorielle (Note d'analyse 284 - Septembre 2012)
L’emploi a été très touché durant la crise. Pourtant, selon les pays et les secteurs d’activité, son évolution n’a pas toujours reflété celle de l’activité, en diminuant plus ou moins que prévu. Afin de mieux comprendre ces dynamiques, cette note étudie l’emploi dans huit grands pays industrialisés et trois secteurs d’activité de référence.
- L'ajustement de l'emploi pendant la crise. Une comparaison internationale et sectoriel
Il apparaît que l’emploi s’est ajusté au choc d’activité selon différentes modalités : parfois, l’ajustement de l’emploi à la demande a été total – il a diminué dans des proportions identiques à cette dernière, laissant inchangé le niveau de la productivité du travail. Du point de vue de l’entreprise, il s’agit ici de stratégie de flexibilité externe de l’emploi. En Espagne, au Danemark et enfin aux États-Unis, l’emploi s’est même “surajusté”, conduisant mécaniquement à des gains de productivité et à une forte augmentation du chômage. Dans d’autres cas, l’ajustement de l’emploi a été partiel (moindre baisse de l’emploi relativement à celle de la demande), les entreprises ayant recours à une diminution du nombre d’heures travaillées et/ou des salaires réels. Ces deux dernières modalités de l’ajustement définissent quant à elles la flexibilité interne de l’emploi. Elle a été observée en particulier en Allemagne, en Italie, aux États-Unis et en France où le choc d’activité a été ainsi absorbé de manière significative par une diminution du nombre d’heures travaillées par personne en emploi et, à l’exception de la France, par celle des salaires réels.
À cet égard, la très forte rétention de main-d’œuvre des entreprises allemandes a motivé l’étude des dispositifs favorisant l’ajustement de l’emploi par le nombre d’heures travaillées, comme celui du chômage partiel. Concernant ce dernier dispositif, les évaluations les plus récentes concluent globalement à son efficacité, durant la crise, à préserver l’emploi, à des degrés divers toutefois selon les pays et les secteurs d’activité. Elles soulignent par ailleurs la difficulté de son pilotage, le dispositif s’avérant optimal dans un contexte conjoncturel particulier, alors que dans un cas plus général il peut entraver les ajustements structurels de l’économie et de l’emploi en soutenant des activités en déclin.
Il convient alors d’identifier au mieux la nature et l’ampleur des crises lors de leur déclenchement d’une part et au cours de leur développement d’autre part, de façon à adapter les instruments de la politique publique de l’emploi. Face à un choc de l’ampleur de celle observée en 2007-2008, des risques structurels peuvent apparaître, comme la progression du chômage de longue durée et/ou la diminution des gains de productivité, réduisant au final le potentiel de croissance en sortie de crise. Ces risques doivent être arbitrés au regard notamment de ceux liés aux stratégies de maintien dans l’emploi, qui peuvent freiner les évolutions structurelles de nature sectorielle et entre les entreprises.
Dans cette note, nous étudions plus spécifiquement le risque sur la productivité du travail. Nous cherchons en particulier à identifier les secteurs et pays qui ont enregistré des chocs persistants – ayant affecté structurellement le niveau ou la tendance des gains de productivité (l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni dans le secteur manufacturier par exemple) – et ceux qui ont renoué avec leur sentier de croissance et pour lesquels les chocs se sont donc révélés transitoires (les États-Unis, l’Espagne dans le secteur manufacturier par exemple).
Sommaire
- Une typologie des ajustements dans la crise
- Un recours inégal à la flexibilité interne ou externe selon les pays, en lien avec les politiques de l'emploi
- L'enjeu d'un soutien conjoncturel
- Auteurs : Christel Gilles, département Travail Emploi ; Jean-Paul Nicolaï, département Économie Finances.
Mots clés : comparaison internationale, crise, marché du travail, secteurs d'activité, politique de l'emploi, productivité, économétrie.